"Bouhwasso! Bouhwasso!",
un cri d'enfants qui résonne chaque Aïd à l'aube dans les ruelles étroites du pittoresque village Agouni Ahmed de la commune d'Ath Yenni, à une quarantaine de kilomètres au sud de Tizi-Ouzou, célébrant une tradition séculaire à l'aube de l'Aïd.
Comme le mot l'indique "Bouhwasso" qui signifie à peu près "qui prendra (l'objet de convoitise) le premier", est un jeu et une sorte de compétition nocturne qui se pratique à l'aube de l'Aïd à partir 3h ou 4h du matin.
Bouhwasso! : Les règles du jeu
Durant ce jeu, les enfants d'Agouni Ahmed, divisés en groupes, guettent les maisons du village pour repérer celle qui va offrir des mets et friandises, a raconté le président de l'association culturelle Azar de ce même village, Mouloud Mehareb.
Les enfants constituent des groupes, désignent un chef de groupe et élaborent leurs stratégies pour pouvoir s'accaparer (Adhyahwess) les meilleures et les plus importantes parts des mets et friandises qui seront distribués par les familles cette nuit.
Toutes les maisons d'Agouni Ahmed seront ainsi visitées et chaque groupe d'enfants tentera d'arriver avant les autres. Dès qu'ils voient les lumières d'une maison allumée, signe que la famille se prépare à sortir ce qu'elle va offrir aux enfants, ces derniers accourent en criant "Bouhwasso".
L' AÏD : Jour de joie pour des enfants
Viandes, gâteaux et autres produits offerts par les familles, sont mangés sur place par les chérubins dans une ambiance joyeuse pour pouvoir poursuivre leur tournée, a ajouté M. Mehareb qui a observé qu' "à un moment donné, après avoir fait deux ou trois maisons et ayant bien mangé et rassasiés, les enfants, qui ne peuvent plus avaler une bouchée de plus, continuent tout de même à courir sans chercher les parts, créant ainsi une ambiance festive, augure de jours joyeux", a-t-il dit.
Cette tradition ancienne qui a disparu dans plusieurs villages de la région et d'Ath Yenni, n'a jamais cessé à Agouni Ahmed où les familles et l'association Azar mettent une pointe d'honneur à la préserver, à l'organiser et à la transmettre.
"Nous allons veiller à la placette du village jusqu'aux environs de 3h du matin puis nous allons sortir en groupe pour faire le tour des maison en criant Bouhwasso pour réveiller les gens afin qu'ils nous donnent notre part du repas (viandes, bonbons, gâteaux)" :
Des enfants des villages voisins et même d'autres wilayas, participent à cette compétition chère aux bambins, qui, l'espace d'une nuit, font la loi dans le village en demandant des friandises aux adultes et en s'arrachant les parts sans qu'on les leur donne, chose qui est répréhensible les autres jours.
Les enfants font le tour des maisons en criant 'awid aylaw' (donnez-moi ma part)
Aouchiche Amine (11 ans), du village voisin Taourirt Mimoune, participe depuis quelques années à ce jeu, a témoigné son père Mokrane, qui a indiqué que "jadis cette tradition était pratiquée dans tous les villages d'Ath Yenni.
Venu de Sidi Bel Abbes Rayane Metref, 13 ans, a réussi à convaincre ses parents originaires d'Ath Yenni de se rendre, cette année dans la région, afin de participer à Bouhwasso.
"Je participe de temps à autres à cette fête, lorsque mes parents se rendent à Ath Yenni, la veille de l'aïd.J'adore l'ambiance de ce jeu qui est une occasion pour nous, de nous amuser et pour moi de retrouver mes amis", a-t-il dit, l'air amusé.
Cette tradition est aussi pratiquée dans le village de Tassaft Ouguemoune dans la commune d'Iboudrarene, voisine de celle d'Ath yenni. Le jour de l'Aïd à l'aube, les enfants font du porte à porte en chantant "Etch Chwitt edj Chwitt awid Aylaw", qui veut dire: "mange un peu laisse un peu et donne moi ma part", pour recevoir gâteaux et divers mets.
L'Aid El Fitr dans les villages de Tizi-Ouzou : Joie et Partage
En ce dernier jour du mois de Ramadhan, les familles d'Ath yenni se préparent à accueillir l'Aïd El Fitr dans la joie et le partage, en plus de Bouhwasso, les familles préparent des "waadas", généralement du couscous sans sauce aux œufs durs qu'on offre aux pauvres, alors que d'autres choisissent de veiller au niveau de la zaouia de Cheikh Belkacem en chantant des chants religieux traditionnels jusqu'au matin.
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